mario campo oeuvres choisies

    IN MEMORIAM 2006
     
    Livre de condoléances
     
     
 

DERNIER MESSAGE DE MARIO (il est mort à 20:00h ce soir-là) :

From: mario campo
To: Danielle Fontaine
Sent: Tuesday, January 31, 2006 11:40 AM Subject: Wow!

Quel pays dont je n'avais entendu le nom...C'est vrai que les gens ont l'air heureux. Nous, on a des mines patibulaires comparé à eux.

Je récupère lentement de la radiothérapie. Beaucoup de mes médicaments ont été changés. Je récupère assez bien. Mais j'ai eu deux crises, dont une où vomi du sang. Maintenant tout semble sous contrôle. J'ai hâte de me remettre à la création (chansons et nouvelles littéraires).Présentement, j'étudie un logiciel de création de site Web.

A bientôt...
Ma blonde cendrée Réjane vous salue

Mario

Danielle Fontaine, 10 février :

Bonjour Alan!

Je te remercie de m'avoir averti. Je m'inquietais vraiment pour lui. Tu sais, il m'avait ecrit le 31 janvier pour me dire qu'il allait mieux, qu'il avait hâte de recommencer sa creation artistique. Je ne pourrais malheureusement pas être au Québec avant le mois de juin. Je travaille au Pakistan cette année et au Cambodge l'année prochaine.

S'il y a autre chose s.v.p. m'avertir. Bonne chance.

Danielle

Poème de Alan :

MARIO

Y paraît que t’es mort, Mario
Incinéré depuis samedi
J’espérais que ça serait une mauvaise joke
Pis que tu répondrais au téléphone

Mais c’est toujours Réjane qui répond
Pis là on cherche ton frère pis ta sœur
Pour leur donner la nouvelle
Le sais-tu que t’es mort toi, Mario ?

Moi, je me sens mort aussi
Depuis hier
Et je t’ai vu mourir cent fois
Durant la nuit
Chaque fois que je me réveillais
Et que je réalisais que t’étais mort

Je me suis réveillé avec un mal de bloc du crisse
Ça pris deux Tylénols Extra Forts
Pis t’es toujours mort, mort, mort
Je souffre d’un hangover existentialiste, Mario

Je me sens comme un Stone
Sans son Brian Jones
Je me sens vide comme un Sid
Avec sa seringue tombée par terre

J’ai toujours cru que t’étais mon âme, Mario
Mais là, c’est mort ça aussi
M’a continuer, c’est sûr, j’ai pas le choix, mais...
My soul has left the building, pal

T’es chanceux, toi
T’es parti avant que Harper
Devienne premier ministre
Y’a déjà coupé les garderies
Une chance que j’avais toi et Réjane
Pour garder notre petit Nico

Je le serres fort et je lui donne
Plus de bisous que d’habitude
J’aimerais partager ma douleur avec
Mais je peux pas lui dire que son « Maîîo » est mort

Il a juste quatre ans, mais il sait déjà
C’est quoi la mort
C’est pour les cow-boys et Star Wars
On se tire dessus puis on se relève debout

C’est quand même drôle que tu sois mort
Après tant de tentatives de suicide
Tu te souviens à chaque fois je sautais
Dans un cab pour aller chez toi

Mais là, j’peux prendre tous les taxis du monde
Pis j’peux pas aller te sauver
Et moi – qui va me sauver, moi
Dans une vie sans toi?

C’est drôle, mais depuis que t’es plus là
T’es partout
Je te vois à coté de moi, j’entends ta voix
Je te parle comme si de rien n’était
Veux-tu une bonne cigarette? Une autre bière?

Tiens, Mulroney qui refait surface dans les nouvelles
Tu te souviens combien on le détestait?
C’est vraiment chiant de savoir que toi t’es mort
Pis que lui y’est encore vivant

T’es mort au bon moment, Mario
Tu verras pas les banquises fondre
Et les espèces disparaître de la planète
Et les gens s’égorger pour des cartoons danois

Je t’envie presque, Mario
Car ce nouveau siècle n’est pas pour nous
Une chance que j’ai Nico et Caro, sinon...
La vie serait très plate par ici sur terre

Mais y’a juste une chose de plus plate que la mort, Mario
Pis toi, ça pourra jamais pu t’arriver
Et ça Mario, c’est d’enterrer ton meilleur chum
Sans même avoir eu la chance

De lui dire adieu
Alan, le 9 février 2006

Max Arnaud, 10 février :

salut,

ouais ! c’est vraiment une enculerie ! j’avais espéré qu’il résiste jusqu’au mois de juin - je serais certainement chez vous à cette date . putain j’aurais jamais cru que sa disparition me fasse si mal... merci pour le poème... c beau comme mario! ça m’as vraiment touché et je pleure comme un minot... c'est super que tu t’occupes de réjane elle va en avoir besoin... je l’ai eu au phone l’autre jour... peuchère ! si personne ne l'aide elle va pas résister.

merci pour les photos aussi... au moins j’ai sa tronche...

bye alan


max

 

Réponse Alan à Max Arnaud :

putain Max, ca fait du bien de t'entendre pleurer - car Mario, c'est un de ces rares mecs qui en valent la peine. allez va, viens t'en au mois de juin, et on va picoler ensemble jusqu'aux larmes. cette fois-ci, je m'occuperai de toi comme il le faut. putain de merde. et moi qui a eu la nouvelle trop tard. cela m'a tué de voir ses bottes et perfecto de loubard vides. et il y avait du sang de ce poète qui maculait le divan sur lequel il a vomit ses derniers caillots de sang. la vie ça pardonne pas, Max, faut se serrer les coudes ensemble et arrêter les brouilles à la con. Je suis le frère de tous ceux qui adoraient Mario. C'était un prince du coeur. Mario Le Pur, tiens.

ciao mon pote,

Alan

 

 

Réponse Max à Alan :

ouais ! cest un pur mario , un vrai sincère... et c’est pour ça que je l’aime ! il s’est jamais prostitué et ca c’est pas fastoche... en fait c’est un seigneur... même qu’il a fréquenté ses vignes !!!!

eh ouais , la vie c’est une grosse putain... et faut faire avec.... c est ca q est con... mais de temps en temps on a des plaisirs et il faut les apprecier sous peine de les regretter comme un gros con qu 'on est peut etre a certains moments de sa vie... les circonstances de la vie ne sont pas toujours faciles a digérer.... sans arret i faut se remettre en question... pas fastoche mais il le faut.... si tout le monde se preoccupait vraiment de son vis a vis... sans penser d’abord a lui meme.. ce serait de l’avancée humaine en criss !

bon sur ces paroles a la con... faut qd meme continuer a rigoler avec mario et sur qu’il nous donnerait raison...... il sera toujours avec nous... pour boire un coup i fera pas sa mijaurée !!!!!!!!!!!!!!

hasta la vista man !

Lucien Francoeur, 10 février :

salut Alan

triste nouvelle pour Mario
mais cest comme ça régulièrement
tout le monde meurt esti
tout le monde a le cancer
je suis le dernier survivant de la contre-culture avec Péloquin mon ami

moi je vais bien
surprenant après tous les excès de drogues et de démesure et de mélancolie et de nostalgie etc

dernier trip fut celui de Burroughs l'héroine chasing the dragon
et je ne regrette rien rien de rien
je prendrais encore de l’héro pour mon mal de vivre bien avant les antidépresseurs de crosseurs
bref je suis toujours le même mais bouddhiste depuis 10 ans comme Tina Turner nammyohorengékyo
avec un peu d’héro comme Mink Deville ou Higelin ou Cobain etc

je crois encore à la révolte et à l’errance je sis en vie esti et toujours aussi baveux mais trop de tendresse et de tristesse trop d’amis perdus

on a eu du crisse de bon temps ensemble
Johnny Frisson est surement un des 5 meilleurs albums de ma vie sinon le meilleur
un album parfait

je suis toujours sur la route avec mon band de Légendes Aut’Chose voivod (piggie mort du cancer en aout dernier) et Groovy Ardvaark et Grim Skunk et aussi Jacques Racine de l’ancien temps

Campo était un bon chum Coma Laudanum un bon livre etc une perte pour la poésie et la vie
Foucrault va bien lui
il a un magasin de diques usagés bien à lui

toujours le même mais un peu moins pire

enfin Alan
je racontais lhistoire de la corvette sur le ganja
good times man

amitiés
je suis dans mon sanctuaire hermétique et je sors peu

salut mon ami lucien xxxxxxxx

Istvan Kantor (Monty Cantsin), 9 février :

hi Alan,
i'm sorry to hear that Mario died,
all my sentiments to you as his best friend and long term comrade,

he was also a neoist conspirator,
and therefore he is now part of "cosmic-urban-eternity",
his subatomic hyper-particles
circulating in the convulsive
revolutionary electrosphere of neoism,
death opens the window to a new perspective of 6 o’clock reality:

past = present = future,
an unending apartment festival in immortality,

REMEMBER MARIO!

istvan/monty/ AMEN!

Lucien Francoeur, 12 février 1h am :

j’ai connu Mario quand j’avais 20 ans dans l’est
chez les frères Tourigny dont François un poète
son Coma Laudanum est un voyage intérieure inoui et ineffable
une écriture onirique et insondable que j’aimais tant et tant
et que j’ai toujours relu et relu stone comme straight
en fumant un joint ou du smack
Campo était un poète de la démesure intérieure
son écriture était diamantaire et irréfragable
ses poèmes des joyaux en mots précieux

ces photos m'ont rappelé cet être cher et sensible et si fragile
lui seul pouvait témoigner de cette solitude des poètes qui fut la sienne
et de ce mal de vivre qui l'habitait et m’habite et me séquestre
dans ma mélancolie incurable

mille mercis pour cette amitié qui fut la nôtre
je me souviens de 7 iles et de l’héro de Dave et de la nausée

certain qu’on devra prendre un café ensemble à Montréal
et certain que je serai là pour Campo l’hommage in memoriam

que sont mes amis devenus disparus
j’amènerai Péloquin s’il est en ville

content que tout aille bien et que ton enfant soit avec nous
ma fille a 18 ans tu peux la voir sur mon site

rock désir
merci pour tout
les Ramones cest le groupe préféré de mon meilleur ami Ronald McGregor
certain que c’était historique et que ça le demeure

moi jai perdu Denis Damour Piggie de Voivod cet été et c’est dur
après avoir perdu Gerry Boulet du même cancer

anyway

it’s only rock n’ roll but I like it

Lucien
ce soir je lis David Goodis et j’écoute Chet Baker

 

Bernard Gagnon, 13 février :

Ça me fait de la peine, Campo.

 

 

Réponse Alan à Bernard Gagnon :

au moins il a vécu de la manière qu'il voulait, et il ne s'est pas trop fait chier. Le matin, il prenait de longs bains en écoutant du Bach et en lisant Baudelaire. Même un Mignonnaire n'a pas ce luxe-là. Il vivait très bien sa pauvreté. Je ne l'ai JAMAIS entendu se plaindre.

 

 

Antonio d’Alfonso, 16 février 6 :50AM :

I read Mario’s last note to his friend Danielle. Incredible. He never thought one moment death was walking by... too close to him. It’s frightening.

 

 

 

Pierre Zovilé, 16 février :

son dernier e-mail m'a fendu le coeur.

 

Joseph Jean Rolland Dubé, 16 février :

Et oui, on a été avec Campo* jusqu'à ce que je me fasse expulser pour non paiement et que Campo décrisse la serrure pour aller chercher mon stock.

On a été tous les trois là pendant presque un an... and these were good times.

( * au Castel Rosalie – A.L.)

 

 

Antonio d’Alfonso, 16 février 11 :36AM :

Mario was very much aware of form (not le formalisme) mais l’histoire de la poésie. This is what places him a notch, in my opinion, above many of his contemporaries who delved in formalisme. This is where one sees that he is of European stock. History Is important to him. He’s American but he is someone else too.

 

 

Antonio d’Alfonso, 16 février 12 :00PM :

Ce qui frappe dans l’écriture de Mario Campo c’est sa forme poétique, non pas cette forme éclatée que le formalisme a donné à ce terme durant les années 1970, mais la forme comme «prison poétique». Étrangement, en dépit du côté apparamment flyé de ses textes, Mario demeure très habit-du- dimanche dans ses textes. Derrière cette façade d’américanité superficielle, Mario Campo est assez vieil Europe dans ses goûts littéraires. Je suis convaincu que ses écrits personnels nous dévoilera combien sérieux était pour le poète l’entreprise littéraire, et ce surtout pendant ses années de silence. L’histoire est important ; l’écriture n’a rien d’ephémère. Tout mot est encré dans un temps autre qui n’est pas le temps d’où il apparaît. Ce trait de déphasé place Mario Campo bien au-delà de l’expérience moderne. Le cri «vous ne m’avez pas eu» sort d’un oiseau qui non seulement traverse notre ciel, mais transperçe plutôt la barrière du temps. Il me parle, moi l’homme des cavernes, moi le robot de la machine.

Réponse Alan à Antonio, 17 février :

Cet analyse est excellent, Antonio. D'ailleurs j'insiste à souligner que tu l'as aimé ET pris au sérieux depuis le début. Mais ses "périodes de silence" n'étaient que des périodes où il n'a pas été publié. Il a toujours beaucoup écrit, j'ai été témoin. Longtemps ses écrits sont restés sous le manteau et jalousement savourés en secret par une poignée d'amis. Mais le plus important depuis quelques années, c'est qu'il est devenu très populaire, bien qu'avec diffusion restreinte. Ses textes sur le site web "Rouscaille" de Max Arnaud sont perpétuellement en cinquième position dans le palmarès des textes les plus lus. C'est pas arrangé avec le gars des vues, ça. He's a fucking hit, man! Et il a écrit 35 poèmes pour le Steak Haché; à un poème par mois, ça veut dire trois ans d'écriture. Une chance que quelques uns l'ont vraiment encouragé, car il était sensible à l'extrême, et basculait facilement dans le découragement. Ouf!... quelle aventure... comme tu peux voir, un Mario Campo, ça dure pas longtemps. Pete Townshend des Who disait à propos du Rock - et cela s'applique aussi à des poètes comme Mario, "toute cette éclatante lumière que vous voyez, cela provient de corps qui brûlent."

 

 

le 17 février – Nico (4 ans) :

On se mettait à table pour souper, et j’ai ouvert une bouteille de vin rouge achetée au dépanneur. C’était pas buvable. J’ai dis « beurk » et j’ai vidé les verres dans l’évier. Soudainement Nico dit :

« Mario aime le vin. »